Pour réussir, le fret ferroviaire doit appliquer certaines recettes qui « font le succès de l’aérien » (organisé autour de hubs et d’alliances) tout en « sort[ant] de la routine dans lequel il est aujourd’hui installé ». Tel est le credo du PDG de Lineas Group, Bernard Gustin, ex-dirigeant de Brussels Airlines qui a rencontré des journalistes à Paris début septembre.
Depuis son arrivée en 2022, il a entrepris de rationaliser l’ex-activité fret de la SNCB, privatisée en 2015 – elle appartient à deux investisseurs institutionnels, dont un lié à l’État belge – afin de limiter ses pertes à moins de 50 M€ en 2023 contre 78 M€. Lineas (le trafic de trains complets représente 50 % de l’activité) a sérieusement révisé son offre (le produit Green Xpress Network qui associait transport combiné et fret classique a été abandonné), a revu ses tarifs dans le wagon isolé, amélioré la relation avec les clients et réorganisé sa production de trains en optimisant son réseau de grands hubs portuaires. « Notre positionnement géographique nous donne l’avantage d’être présents sur les plus grands ports du Nord, Gand, Zeebrugge, Anvers, Rotterdam, il faut en profiter », souligne-t-il. Pour améliorer la qualité de service, Bernard Gustin cherche à privilégier les partenariats entre opérateurs, à l’instar de l’accord conclu pour desservir la Suède. « Lorsque deux entreprises sont en compétition sur un trafic international, le gagnant fait souvent appel au perdant comme sous-traitant. Parfois, c’est le Far West, la qualité n’est pas là. En revanche, si deux entreprises s’engagent sur des moyens et des objectifs comme dans l’aérien, l’alliance opérationnelle s’applique automatiquement lorsque l’un gagne », détaille-t-il, réfutant le risque de pratiques anticoncurrentielles. Un autre avantage est de pouvoir étendre sa zone d’action. « Le gagnant sera celui qui proposera le réseau le plus large », estime le dirigeant.
Plus gros opérateur privé en Europe, Lineas déclare vouloir prendre part à la consolidation d’un marché qu’il juge éclaté. Cependant, l’augmentation de capital en cours, visant à lever 100 M€ d’ici début 2024, est uniquement destinée à soulager les finances de l’entreprise et à lui éviter la faillite. Les deux actionnaires, le fonds français Argos Wityu et la Société fédérale de participations et d’investissement (SFPIM) ont déjà injecté 20 M€. Des pourparlers ont lieu avec une quinzaine d’investisseurs.