L’ÉDITO
CHRONIQUES
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FRET FERROVIAIRE : CONTINUITÉ OU DISCONTINUITÉ DES POLITIQUES (épisode 1)
CHRONIQUES
DE LA SOBRIÉTÉ AU RATIONNEMENT : LES FRUITS AMERS DE LA CROISSANCE ÉCONOMIQUE
TRANSPORT DE FRET ET MONDIALISATION : STOP OU ENCORE ?
ÉDITO
FRET FERROVIAIRE : CONTINUITÉ OU DISCONTINUITÉ DES POLITIQUES (épisode 1)
Avant un nouveau dossier sur le sujet, voici les enseignements que je tire du visionnage des premières auditions de la commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur la libéralisation du fret ferroviaire à la date du 19 septembre.
La crise du fret ferroviaire en France ne date pas de l’ouverture à la concurrence. L’évolution de la nature de la demande de fret et donc du « cahier des charges » des chargeurs, dans une concurrence plurimodale, est grandement liée à la très forte désindustrialisation de la France, à partir de 1995, accélérée après 2002, avec un plongeon entre 2007 et 2015 et, semble-t-il, un arrêt du processus en 2015. À cela s’ajoute une tendance lourde à la démassification des flux due à la compétition des transporteurs routiers de marchandises (TRM) étrangers sur les flux longue distance d’échange (le commerce extérieur continental de la France), de transit et même de cabotage.
Dans l’ensemble, le TRM s’est très bien adapté à l’évolution de la demande. Les travaux économétriques conduits récemment permettent même d’affirmer qu’en France, il l’a accélérée. Jusqu’il y a peu les spectaculaires gains d’efficacité des transporteurs et les logisticiens ont fait que le coût relatif du transport et de la logistique a augmenté moins vite que les autres coûts conduisant à des arbitrages dans les localisations ainsi que dans l’organisation des chaînes logistiques très efficaces économiquement, mais pas forcément les plus vertueux sur le plan du développement durable.
Inversement, le faible intérêt pour le fret ferroviaire – jusqu'il y a peu –, face aux priorités données au développement du TGV puis des TER et à la maintenance du réseau ferroviaire après le choc du rapport Rivier (École polytechnique fédérale de Lausanne) sur l’état du réseau ferré a conduit à un sentiment de déréliction pour le fret : « Il n’y a rien à faire se sont des tendances lourdes qui nous échappent.
L’impréparation du groupe historique à l’ouverture du fret et la volonté de maintenir un statu quo social n’ont pas permis d’anticiper. Dans une même situation d’ouverture à la concurrence, l’Italie a vu la part modale du fer passer de 5 à 10 %, lorsqu’elle passait de 18 % à 9 % en France.
La concurrence entre les différentes « fonctionnalités » du fer, à la fois pour les investissements et sur l’allocation des capacités en faveur des trains de voyageurs, a dégradé les conditions opérationnelles pour développer l’activité. En témoigne, l’état des triages, des gares et voies de service fret, des terminaux multimodaux, des capillaires fret et des petites lignes mixtes (45 % des tonnages fret) qui étaient, il faut le dire, assez proches d’une situation d’abandon.
La « stratégie de suppression du wagon de queue » qui a conduit à supprimer les flux les moins rentables n’a pas donné des résultats aussi probants qu’escomptés (le fret est une économie de réseau, qui nécessite un maillage). La prise de pouvoir de « financiers » au détriment des ingénieurs-économistes n’a pas aidé non plus.
L’échec cuisant d’Ecomouv’ puis la reculade sur l’augmentation de la taxe carbone lorsqu’il était encore temps n’ont pas permis de mettre en place un cadre de régulation entre les modes. La situation qui en résulte est que le TRM est très compétitif et bien adapté aux besoins des chaînes logistiques, et donc performant dans une logique de marché. Cependant la prise de conscience que son développement sans limites n’est pas optimal pour la société dans son ensemble est partagée par de nombreux chargeurs et même par les transporteurs routiers. Il est sans doute trop tard pour taxer un TRM confronté à une urgence de décarbonation qui nécessite des investissements qui vont se compter en milliards d’euros pour le renouvellement de la flotte, l’adaptation des moyens d’avitaillement et de recharge électrique alors que ses coûts opérationnels vont désormais croître plus vite que les coûts de production.
Les aides d’État de la période précédente visaient à maintenir à flot le principal opérateur sur ce marché dans l’attente d’une réelle stratégie en faveur du fret ferroviaire. La nouvelle génération d’aides mises en place vise à réguler un marché complexe, plurimodal et sans maturité compte tenu de la diversité des segments de marché et des handicaps liés aux infrastructures et à accompagner le déploiement de la stratégie pour le développement du fret ferroviaire.
L’inflexion positive de la politique en faveur du fret ferroviaire marque, de notre point de vue, une discontinuité dans les politiques de transport. L’enquête pour infraction lancée par l’UE à l’encontre de Fret SNCF pour des aides d’État possiblement illégales ou incorrectement notifiées pourrait déboucher sur une solution de discontinuité pour Fret SNCF afin d’éviter un remboursement à l’État et, par conséquent, la liquidation de l’entreprise. Le paradoxe économique est assez saisissant. Entre une lecture juridique et les considérations économiques et écologiques, l’enjeu est évidemment politique.
Au-delà de cette question qui est au cœur des investigations de la commission d’enquête parlementaire, l’intérêt des auditions est aussi d’écouter l’avis de personnes hautement qualifiées et qui ne sont plus aux affaires à propos des conditions de réussite de la stratégie nationale pour le fret ferroviaire. Cet éditorial ne permet pas d’en rendre compte dans le détail. Relevons quelques points saillants néanmoins.
Il faut mettre en place une garantie minimale de sillons par heure pour le fret. Le règlement RTE-T, qui devrait être adopté prochainement, obligera de réserver deux sillons par heure et par sens garantis sur tous les corridors de fret. En garantissant des sillons de jour, on réduit la pression sur les circulations de nuit. Il convient, néanmoins, de mieux arbitrer entre les plages travaux et les circulations de fret et de ne plus fermer les deux voies lorsqu’il n’existe pas d’itinéraire alternatif.
Le programme d’investissements dédiés fret de 4 Md€ entre 2023 et 2032 (donc pour moitié entre deux CPER) doit permettre des améliorations rapides. Les plateformes d’infrastructures et de services doivent veiller à l’allocation optimale des capacités, notamment dans les nœuds ferroviaires. La coexistence entre les trains de voyageurs, longue distance en approche des métropoles, les TER avec un éventuel développement des SERM et les trains de fret doit être monitorée de près. C’est l’objet des plans d’exploitation de référence (horizon cinq ans) et des plans d’exploitation émergents (horizon dix ans) que SNCF Réseau doit livrer d’ici mars 2024.
Le réseau ferroviaire français est l’un des moins circulés d’Europe, il y a donc de la réserve de capacité en ligne. Néanmoins, de nombreux points singuliers constituent des goulets d’étranglement particulièrement péjorant pour le fret ferroviaire, notamment pour les circulations long parcours. SNCF Réseau doit étudier et réaliser en urgence les investissements de désaturation de ces points singuliers. Il convient également de conserver les rares itinéraires dédiés au fret, notamment la ligne en rive droite du Rhône.
Enfin, concernant les investissements purement fret : l’arbitrage sur la mise au gabarit des tunnels au standard P400 européen et surtout pas franco-français sur les axes Forbach-Paris-Hendaye, Paris-Dijon, Luxembourg-Suisse mérite d’être réexaminé pour ne pas faire sortir le fret français du marché européen (« on compte seulement en centaines de millions, au total 1 ou 2 Md€ ») ; l’adaptation du réseau aux trains de 850 m (évitements et adaptation des voies de service), la mise en place l’installation permanente de contresens pour améliorer la résilience du réseau et concilier les travaux et le maintien des circulations de fret avec en priorité les itinéraires Bordeaux frontière espagnole et Dijon-Toul.
Hervé Nadal
Notes
1. Le fret français n’a pas été coopératif, il a raté – dans un premier temps au moins – l’échelle européenne et donc les segments les plus dynamiques du marché. En outre, le refus de coopération avec des opérateurs ferroviaires de proximité a abouti à une forte réduction des trains du lotissement a contrario des choix allemands.
2. Pour les lecteurs intéressés et avant le prochain dossier, car parfois la répétition n’est pas inutile, le sujet a été plusieurs fois traité dans les colonnes de TI&M.
N° 529, septembre-octobre 2021 dans le dossier « Une stratégie pour le fret ferroviaire, enfin ! Report modal, un objectif, mais surtout un art d’exécution », « Fret ferroviaire : enjeu stratégique de la filière chimie » Christian Rose responsable transports et logistique chez France Chimie, « La relance du fret ferroviaire : une approche des éléments de méthode » François Philizot.
N° 530, novembre-décembre 2021 « Pour une reconquête du fret ferroviaire en France » avec les articles du président d’Objectif OFP, de l’Alliance 4F et du délégué général du GNTC.
N° 532 « Système ferroviaire et questions économiques ».
3. Argenteuil en Île-de-France pour les flux Haropa, Le Bourget et l’accès à la grande ceinture nord – le versant sud de la plateforme infrastructures et services de l’axe nord – et Valenton-Rungis, le nœud lyonnais à la fois pour les flux nord-sud et dans la perspective de l’ouverture du tunnel Lyon-Turin, le sillon mosellan, les accès aux ports de Marseille et de Fos-sur-Mer.
DE LA SOBRIÉTÉ AU RATIONNEMENT : LES FRUITS AMERS DE LA CROISSANCE ÉCONOMIQUE
Il y a un an, face aux risques de pénurie de gaz, le président de la République évoquait « la fin de l’abondance ». La sobriété devenait une priorité des politiques publiques. La pénurie n’est plus d’actualité, mais la sobriété et le rationnement le restent : conséquence importune et pourtant logique de la croissance économique !
La reprise du transport aérien, et du tourisme en général, conduit à l’instauration de quotas : 400 personnes par jour dans les calanques de Marseille, 50 000 alpinistes par an au sommet du Mont-Blanc, arrêt des navettes au mont Saint-Michel en cas d’affluence excessive, interrogations sur le surtourisme à Venise, à Barcelone ou à Prague, mais aussi à Étretat ou à Giverny. Dans la même veine, l’aéroport de Schiphol¹ est engagé dans un bras de fer avec la municipalité d’Amsterdam qui veut réduire de 500 000 à 425 000 par an le nombre de mouvements d’avions. Le bannissement de l’aviation d’affaires, décidée par l’aéroport, ne permettra pas d’atteindre l’objectif, car le problème n’est pas la mobilité des très riches, mais la démocratisation rapide du transport aérien.
Les vraies limites de la croissance
Dans de nombreux domaines, et notamment les transports, la croissance économique, c’est-à-dire les gains de productivité et la baisse des coûts, augmente les flux. Il y a cent cinquante ans, l’économiste anglais William Stanley Jevons (1835-1882) mettait au jour cet « effet rebond ». En trente ans, la baisse de 60 % de la quantité de charbon nécessaire pour produire une tonne d’acier s’était accompagnée d’une multiplication par 10 de la consommation de charbon. Jevons s’inquiétait du risque de pénurie de cette roche sédimentaire. Il se trompait. Aujourd’hui encore, les réserves mondiales de charbon sont immenses.
La même erreur de raisonnement a caractérisé il y a cinquante ans le rapport Meadows². La rareté des ressources naturelles et notamment du pétrole y était présentée comme la principale limite de la croissance. Depuis, la production de pétrole ne cesse de progresser, avec les impacts négatifs que l’on connaît sur le climat. Il existe donc bien des limites à la croissance, mais ce ne sont pas celles que l’on croit. Réminiscence des crises frumentaires des siècles passés, le sens commun associe la crise à l’idée de pénurie. Or, s’il peut exister des pénuries sectorielles (terres rares ?), le problème clé de la croissance n’est pas la pénurie de ressources, mais la surabondance de biens. Ainsi, depuis le premier choc pétrolier, le parc automobile mondial a plus que quadruplé !
Les vraies limites de la décroissance
Face aux multiples effets négatifs de l’enrichissement généralisé (obésité, pollution, bruit, dérèglement climatique, atteintes à la biodiversité…), pourquoi ne pas arrêter la croissance ? Au niveau de développement où nous sommes, ne pourrait-on pas en finir avec la recherche du toujours plus ? Séduisante en première analyse (la sobriété heureuse !), la « solution » de la décroissance est à la fois paresseuse et simpliste.
Paresseuse par symétrie simplificatrice : la croissance crée des problèmes, alors supprimons la croissance ! Un peu comme si, sous prétexte que les amours sont souvent tumultueuses, on interdisait les tendres relations. Or, ces dernières, comme la croissance, ont quelques charmes à faire valoir !
Simpliste, car elle suppose d’arrêter l’Histoire et notamment celle des technologies. Or le progrès technique est au principe des gains de productivité et de la hausse du pouvoir d’achat laquelle ne conduit pas à une augmentation homothétique des volumes consommés. En France, depuis 1950, le poids des dépenses de santé dans le PIB a quadruplé, de 2,5 à 10 %. Dans le même temps, les dépenses d’alimentation chutaient de 30 à 15 % du budget des ménages.
C’est là que résident les limites de la décroissance : son premier impact serait une pression accrue sur le système de santé, les retraites et les services publics en général. Les Grecs (-30 % de PIB depuis 2011) ont payé le prix de la décroissance !
Rationnement : efficacité et acceptabilité de l’action sur les quantités
Le dilemme est patent : poursuivre la croissance cause à la planète des dégâts majeurs, voire irrémédiables. Choisir la décroissance revient, sous prétexte qu’il est obèse, à jeter le bébé pour scruter l’eau du bain ! Face à cette double contrainte, il n’existe pas de solution simple, les politiques publiques tâtonnent. Comment freiner la machine ? Agir sur les prix et les revenus ? Ou agir sur les quantités via la sobriété et le rationnement ?
Ce dernier est considéré comme archaïque. Pourtant, dans le monde des transports, les politiques publiques y recourent fréquemment. Limites de vitesse, ralentisseurs, réduction des espaces de stationnement et de circulation des automobiles, zones à faibles émissions (ZFE), objectif « zéro artificialisation nette » (ZAN) et, à l’échelle européenne, généralisation des quotas carbone. Cette liste que le lecteur pourra compléter nous apprend que dans des domaines aussi divers que la sécurité routière, le bruit, la pollution, l’aménagement urbain et désormais la décarbonation, le rationnement est une solution à la fois efficace et suscitant moins de rejet que l’action sur les prix. La question n’est donc pas de savoir si les engagements climatiques conduiront à des rationnements, mais d’en définir la forme et l’ampleur !
Notes
1. De 2000 à 2019, le nombre de passagers y a progressé de 82 % (de 39,3 à 71,7 millions) https://www.schiphol.nl/en/schiphol-group/page/traffic-review/
2. Le rapport de Donella Meadows et de ses collègues, dont son mari Dennis, est en accès libre. https://collections.dartmouth.edu/content/deliver/inline/meadows/pdf/meadows_ltg-001.pdf
TRANSPORT DE FRET ET MONDIALISATION : STOP OU ENCORE ?
Le développement continu des échanges, de la fin de la Seconde Guerre mondiale à nos jours, a transformé l’économie internationale. Pourtant, le thème de la mondialisation est aujourd’hui en discussion. La récente crise du Covid a fragilisé des chaînes d’approvisionnement vitales et l’Europe entend retrouver sa souveraineté industrielle et énergétique, les tensions géopolitiques entre la Chine et les États-Unis remettent en cause le libre-échange : est-on entré dans une phase nouvelle, voire une dé-mondialisation ? Quelles peuvent en être les conséquences pour le transport de fret ?
Des mondialisations successives
Sans remonter aux « économies mondes » de Fernand Braudel dans la Méditerranée du XVIᵉ siècle et pour s’en tenir à l’ère industrielle, les échanges s’organisèrent à l’échelle internationale selon une première mondialisation dès la fin du XIXᵉ siècle. Cette phase prit fin avec la Première Guerre mondiale suivie de la crise économique des années 1930 et du retour de pratiques protectionnistes. Une seconde mondialisation se mit en place, après la Seconde Guerre mondiale, avec une croissance très rapide des échanges et un retour graduel au libre-échange. Elle se traduisit par une croissance très vive du commerce international, à un rythme double de la croissance de la production mondiale.
Les années 2000, marquées notamment par la crise financière internationale ouverte en 2008 et ses effets dépressifs, ralentissent cette évolution, mais sans l’annuler : le commerce mondial croît désormais à un rythme proche de celui de la production.
Volume et structure des échanges, nature des produits
Alors que le commerce mondial se compose de biens pour 80 % environ (et donc de services pour 20 %), les flux commerciaux se traduisent dans leur majorité par des flux de transport (le transfert de propriété d’un produit s’accompagne généralement de son transfert dans l’espace). Le graphique suivant montre l’expansion des échanges de 1950 à 2021.
Présenté en coordonnées logarithmiques, il montre une courbe quasi linéaire et donc un taux de croissance annuel à peu près constant tout au long de ces soixante-dix ans, avec toutefois un ralentissement à partir de 2008.
Le volume des échanges mondiaux a, sur l’ensemble de la période, plus que centuplé !
Commerce international mondial (exportations), 1950-2021 en milliards de dollars, échelle logarithmique. Source : calculs à partir de données de l’OMC.
Cette croissance exponentielle s’est accompagnée d’un changement de la structure des échanges. Entre 1950 et 2021, la part des produits agricoles dans le commerce mondial a chuté de 47 % à 10 %, celle des produits pétroliers et minéraux est passée de 16 % à 18 % et celle des produits manufacturés est devenue majoritaire, passant de 37 % à 72 % (portée par l’utilisation massive des conteneurs et des navires porte-conteneurs).
Commerce international mondial (exportations) par groupes de produits, 1950-2021, milliards de dollars, pourcentages. Source : calculs à partir de données de l’OMC.
En outre, le statut technique des produits échangés a largement été transformé. Ce ne sont plus seulement des matières premières et des productions primaires ou, à l’inverse, des produits finis qui sont échangés, mais, dans une proportion croissante, des produits intermédiaires.
On estime qu’environ 40 % du commerce mondial relève du commerce intrafirme (entre filiales d’un même groupe) et porte sur des semi-produits, des composants. Le transport participe alors non seulement aux échanges, mais à l’organisation spatialement éclatée de la fabrication, renforçant le rôle organisateur de la logistique.
Ralentissement de la mondialisation ?
L’importance du commerce international en comparaison avec le PIB mondial a crû régulièrement jusque dans les années 2000, passant de 13 % en 1970 à 31 % en 2008, puis cette proportion a stagné aux environs de 28 %. Comme le PIB continue d’augmenter, le commerce international et les transports internationaux continuent de croître (pas de dé-mondialisation à ce jour).
Cette irrégularité ajoute à l’incertitude générale liée à l’impérieux besoin, mal pris en compte, de décarbonation de l’économie mondiale et singulièrement des transports, aux conflits et réorganisations géopolitiques en cours (montée des « Sud » et remise en cause du leadership occidental, rivalité stratégique entre les États-Unis et la Chine), de régionalisation éventuelle des systèmes industriels, etc.
Commerce international comparé au PIB mondial (%), 1970-2021. Source : Banque mondiale.
La réaction des grands transporteurs logisticiens
On a déjà souligné ici que l’armement maritime CMA CGM, ayant réalisé des profits exceptionnels pendant la pandémie, met en œuvre une stratégie mondiale d’expansion et de diversification⁶. Son concurrent MSC ne fait pas autrement, par exemple en acquérant récemment l’ensemble des activités logistiques, portuaires et terrestres du groupe Bolloré en Afrique. En se mondialisant encore davantage, en passant du transport maritime au transport multimodal (maritime, terrestre, aérien) et du transport à la logistique, en renforçant leur résilience et leur organisation intégrée face aux chocs exogènes à venir, ces grands acteurs du transport se préparent à une nouvelle phase de mondialisation.
Note
1. Fernand Braudel (1967), Civilisation matérielle, économie et capitalisme : XVᵉ-XVIIIᵉ siècle, Paris, A. Colin.
2. Cf. Angus Maddison (1995), L’Économie mondiale, 1820-1992, analyse et statistiques, Paris, OCDE.
3. L’ancien directeur général de l’Organisation mondiale du commerce, Pascal Lamy, affirmait que la mondialisation reposait sur deux outils principaux : l’ordinateur pour les flux d’informations et le conteneur pour les flux de produits.
4. Soit un rythme de croissance moyen de 2,7 % par an entre 2015 et 2022 pour le PIB mondial et de 2,6 % pour le commerce mondial. Source : World Trade Outlook and Statistics (2023), WTO.
5. Il n’agit bien du rapprochement de deux grandeurs de natures différentes. Le commerce n’est pas une part du PIB, et pour certains pays (les Pays-Bas, par exemple), le commerce international entrant et sortant est plus important que le PIB national. Quant au PIB, il est l’addition des valeurs ajoutées produites en une année tandis que certaines marchandises sont vendues et achetées plusieurs fois dans l’année.
6. « Du port à port au porte-à-porte », TI&M n° 533, mai-juin 2022.
ACTUALITÉS
DOSSIER À LA UNE

Agenda octobre 2023-avril 2024… De nombreux arbitrages attendus et un risque d’embouteillage au Parlement
L’agenda transport des prochaines semaines et des mois à venir sera particulièrement rempli. De nombreux dossiers, avec des liens étroits entre eux, arrivent en phase d’arbitrage. Il y a un an (TI&M n° 534, juillet-août 2022), nous proposions notre agenda de publication sur ce qui nous semblait être les sujets principaux. Parmi ceux-ci, les suivants sont proches d’arriver au temps des décisions :
1. les trajectoires de décarbonation des transports au regard de la capacité à répondre à la demande finale d’énergie décarbonée qu’elles supposent ;
2. la planification écologique dans le domaine des mobilités ;
3. les enjeux économiques, techniques et financiers liés à la planification, la programmation et la réalisation des investissements sur les infrastructures ;
4. le fret et la logistique : pour une approche rationnelle ;
5. France, Europe et politique des transports ;
6. gouvernance des politiques de transport.
Le financement des infrastructures de transport et celui de la planification écologique vont nécessiter de faire des choix dans un contexte budgétaire et fiscal extrêmement contraint. La prochaine loi de finances devrait apporter de premiers éléments de réponse, mais c’est la trajectoire sur vingt ou vingt-cinq ans qui interroge pour atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050. L’objet de cet article est de faire un rapide survol. Notre comité de rédaction d’octobre choisira les angles à approfondir.
RUBRIQUES
TRANSPORTS
TI&M 540
Juillet - Août 2023-
Enquête GART sur les véhicules en libre-service dans les collectivités françaises : état de l’offre et des modalités d’encadrement
Alain Jund
INFRASTRUCTURE
TI&M 536
Novembre - Décembre 2022-
Élargissement à l'Est du RTE-T, entre géopolitique et logistique
Michel Chlastacz - Journaliste
EUROPE
TI&M 540
Juillet - Août 2023-
Les autorités de régulation des transports en Europe
Michel Savy
-
Controverses à Bruxelles autour des nouvelles normes d’émission de CO2 des poids lourds
Cécile Combette-Murin
CLIMAT & ÉNERGIE
TI&M 530
Novembre - Décembre 2021- Transport & civilisation écologique : La Chine tiendra-t-elle ses promesses en 2060 ?
Jincheng Ni - France Stratégie / Hervé De Tréglodé - Ingénieur général des Mines honoraire - Comment baisser les émissions de CO2 du secteur des transports?
Alain Quinet - Président de la commission sur la valeur du carbone, membre de la commission de l’économie du développement durable
LOGISTIQUE
TI&M 538
Mars - Avril 2023- De l’importance des flux locaux de marchandises
Michel Savy - Professeur émérite à l’École d’urbanisme de Paris et à l’École des Ponts-ParisTech - Décarbonation du dernier kilomètre en zone dense : quel potentiel pour la messagerie ? Le cas d’une tournée de livraison parisienne
Emmanuel Cohen - Ingénieur d’études à l’université Gustave-Eiffel - La Responsabilité sociale des Entreprises, facteur d’engagement professionnel ?
Géraldine Piat - université Bretagne ouest, lauréate bac +5, 1ᵉʳ prix de l'AFITL - Financement maritime : vers une révolution verte ?
Cécile Bes - université Paris I Panthéon-Sorbonne, lauréate +5, 2ᵉ prix de l'AFITL
POLITIQUE DES TRANSPORTS
TI&M 540
Juillet - Août 2023-
Précarité vs sobriété : quel rôle pour la mobilité inclusive dans la transition écologique du secteur des transports ?
Thomas Meriot & Florent Laroche
-
Agenda octobre 2023-avril 2024… De nombreux arbitrages attendus et un risque d’embouteillage au Parlement
Hervé Nadal
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