Un vrai paradoxe. La modernisation du métro parisien pourrait bien rimer pour les usagers avec la pérennisation d’un niveau de service volontairement et massivement dégradé en certains points du réseau. Les raisons en sont multiples.
L’héritage négatif des Jeux olympiques de Paris de 2024 sur le fonctionnement de la ligne 14 est de nature conjoncturelle. Pour assurer à temps l’ouverture in extremis de l’extension jusqu’à Orly fin juin, « la RATP a fait l’impasse sur certaines fonctionnalités non essentielles qu’elle a ensuite dû activer tout au long de 2025 et peut-être encore en 2026 » selon une source. Après deux fermetures préparatoires et complètes de la ligne 14 (7-14 avril et 8-12 mai), « ses 800 000 usagers quotidiens ont du mal à comprendre des interruptions après coup », souligne Marc Pélissier de la FNAUT. Lors de la dernière fermeture (4-8 août), la Régie a proposé des alternatives d’une autre époque, au choix : un premier bus puis le tramway T 7 ; un autre bus de substitution depuis Denfert avec des horaires aléatoire et « une fréquentation qui risque d’être élevée » prévenait-elle ; ou bien le RER B et quinze minutes de marche pour attraper Orlyval, du fait de la fermeture de certaines gares du RER B !
Les JO ont aussi conduit cet été à un rattrapage d’interventions de tout type sur sept autres lignes avec des campagnes de fermeture (par station, par plages horaires, par jour de la semaine) « intenses » selon l’expression de Jean-Louis Houpert, directeur de RATP Infrastructures. Cette politique de dégradation maîtrisée et ciblée de l’offre, la Régie et son autorité organisatrice l’ont généralisée ces dernières années avec l’automatisation des lignes existantes. Après les lignes 1 et 4, viendra le tour de l’automatisation de la ligne 13 dont IDFM a attribué cet été le marché à Siemens. « Nous partons pour dix ans de travaux et de perturbations. Or le parcours de la 13 n’est pas propice à des lignes de bus de substitutions performantes », redoute la FNAUT. Les voyageurs des lignes 7 et 8, autres axes très fréquentés, sont promis au même sort. À cela s’ajoute l’effet indirect de la modernisation du matériel roulant : les 410 rames du MF 19 – en version automatique sur certaines lignes – qui seront déployées sur huit lignes de 2026 à 2035 nécessitent des travaux d’adaptation du réseau.
Enfin, à l’instar du réseau ferroviaire national, l’infrastructure du métro (les aiguillages notamment) vieillit et la maintenance avec des solutions industrialisées doit s’intensifier.
Le gigantesque dérapage de la modernisation du métro automatique de Lille permet de relativiser les désagréments encadrés du réseau parisien. Annoncé en 2016, le nouveau système (signalisation, rames) doit être livré en 2026 après des années de service dégradé et des pannes intempestives.