Le pari audacieux tenté par le transporteur routier Portmann, l’entreprise ferroviaire DB Cargo et le géant de l’ameublement Ikea sera à suivre de prés. Il est en effet susceptible de remettre en question certains standards du transport combiné rail-route. En janvier, ces trois acteurs devaient lancer en service commercial une navette ferroviaire entre Metz et Paris/Valenton, soit un parcours de 330 à 340 km alors que cette technique de report modal est généralement considérée comme viable économiquement à partir de 500 km de trajet environ.
La création de ce service résulte d’une demande exprimée dans le cadre de sa politique CSRD par Ikea au transporteur alsacien Portmann, l’un de ses prestataires aujourd’hui propriété de la Poste Suisse. « Ikea apporte un fonds de commerce important en guise de colonne vertébrale du dispositif », indique Jean-Michel Bauer, directeur général du transporteur basé dans la région Grand Est. L’engagement de l’industriel suédois en matière d’UTI assure toutefois moins de la moitié du remplissage des navettes. Pour compléter, « nous nous portons garants d’alimenter un peu plus d’un demi-train, soit 26 unités multimodales sur 48 par jour dans les deux sens », détaille le chef d’entreprise. Pour assurer une meilleure zone de chalandise, le service Metz-Paris marquera un arrêt intermédiaire à Nancy avec un pré et post-acheminement routier sur un rayon limité à une quarantaine de kilomètres. Un autre ingrédient, sans doute le plus important, entre également dans la recette censée assurer l’équilibre financier. Compte tenu de la courte distance, le matériel roulant et le conducteur pourront effectuer un aller-retour quotidien. « La navette accomplira ainsi 660 à 680 km journaliers, ce qui change les conditions », soulignent les promoteurs du projet. Au total, le service nécessite 10 à 15 chauffeurs routiers de chaque côté.
Avec cette initiative, la part du rail-route dans le chiffre d’affaires du transporteur restera modeste – elle passera de 1 à 4 % –, mais sa progression illustre une certaine tendance de fond. L’obligation de décarboner leurs activités pour répondre aux contraintes réglementaires conduit des chargeurs à demander à leurs prestataires de leur proposer des solutions de report modal. Cela pousse un certain nombre de transporteurs indépendants à se convertir à cette solution ou à développer davantage leur offre multimodale.