Qu’il s’agisse d’Emirates, d’Etihad Airways et de Qatar Airways, de leurs filiales, mais aussi de Saudia Airlines ou, plus près de l’Europe, de Turkish Airlines, la montée en puissance de ces opérateurs inquiète de plus en plus. Profitant notamment de leurs positions entre Europe et Asie ou Australie, d’une bonne santé financière, du soutien de leurs États et de moindres contraintes environnementales ou fiscales (pas d’obligation de SAF par exemple), ils surclassent les compagnies traditionnelles, notamment sur les liaisons long-courriers, grâce entre autres à des hubs efficaces. En l’espace de vingt ans, Emirates a augmenté son offre de 357 %, Turkish Airlines de 651 % et Qatar Airways de 914 %. Trafic, chiffre d’affaires, bénéfices et investissements suivent, que ce soit à travers les commandes d’avions, les constructions d’aéroports (le futur Al Maktoum à Dubaï ou le nouvel aéroport d’Istanbul) et surtout l’extension des réseaux, le plus souvent par liaisons directes depuis leur hub. Par exemple, Emirates dessert aujourd’hui 148 villes dans 80 pays, affiche un carnet de commandes de 314 appareils, Airbus ou Boeing, alors que sa flotte (260 appareils à fin mars 2025) accuse 10,7 ans d’âge moyen. Il faut ajouter à cela les multiples partenariats, rachats ou prises de participations dans des compagnies fragilisées : ainsi de Turkish et de la compagnie Air Europa ou encore les accords passés entre Qatar Airways et Aer Lingus ou Level, le low cost long-courrier du groupe IAG, basée à Barcelone.
La menace est telle – plus de la moitié du trafic long-courrier entre le Golfe et l’Europe est désormais détenue par des compagnies non européennes – qu’Air France-KLM et Lufthansa en appellent à des « règles du jeu équitables », estimant cette concurrence étrangère « déloyale ». Ce que confirme l’IATA qui évalue la perte annuelle enregistrée par les compagnies européennes à 5 Md€.