La faillite malvenue de l’autoroute ferroviaire alpine

©© Mouliric - Autoroute ferroviaire alpine à Saint-Michel-de-Maurienne.

Grilles d’entrée maintenues fermées par une chaîne cadenassée, herbes folles envahissant le terrain… à l’arrêt depuis bientôt deux ans et demi, le terminal de l’autoroute ferroviaire alpine (AFA) à Aiton (Savoie) fait peine à voir. Malgré la réouverture en avril 2025 de la ligne ferroviaire de la Maurienne, après dix-neuf mois d’interruption consécutive à un éboulement, le service franco-italien de transport de camions par trains est la seule activité fret à ne pas avoir repris son fonctionnement normal. Il ne reprendra plus. Resté en veille pendant cette interruption forcée de l’exploitation, l’opérateur franco-italien, détenu à égalité des parts par Rail Logistics Europe et Mercitalia, n’a pu relancer la liaison faute de subventions. « Cette situation étant devenue intenable financièrement, elle a conduit à initier le processus de liquidation de l’AFA en septembre 2025 ainsi qu’un plan de licenciement collectif pour les 20 salariés du terminal d’Aiton », annonce la SNCF. Un dispositif d’accompagnement et de reclassement a été proposé aux salariés.

Un tel échec vient souligner la vulnérabilité du modèle économique de ce service de ferroutage ouvert en 2003. Il met aussi en avant l’impact accru du bouleversement climatique et des catastrophes naturelles. Si le niveau de subventions versées par la France et l’Italie a baissé au fil du temps, le fonctionnement de l’AFA est resté tributaire des subsides publics. Selon la députée de Savoie Émilie Bonnivard qui en début d’année avait tiré la sonnette d’alarme auprès du gouvernement, les deux États n’ont pas tenu leur engagement sur fond de mésentente. Paris et Rome devaient verser chacun 600 000 € en 2023 et 2,2 Md€ en 2024. Avant qu’un éventuel appel à manifestation d’intérêt (AMI) envisagé par les deux États aboutisse, il se passera donc beaucoup de temps avant de revoir des camions traverser les Alpes sur wagon Modalohr entre la Savoie et Turin.

La discrétion et la gêne prévalent du côté des pouvoirs publics devant ce sérieux accroc au déploiement d’une politique publique de report modal inscrite dans le cadre de l’accord de Paris. L’arrêt sine die de ces navettes qui offraient jusqu’à quatre départs par jour pour franchir l’obstacle naturel des Alpes sur 75 km – le trafic atteignait selon la SNCF quelque 30 000 camions par an – intervient au moment où on aurait le plus besoin de cet outil alternatif au tout routier. Le tunnel routier du Mont-Blanc étant fermé pour trois mois (de septembre à mi-décembre) en raison d’une campagne de travaux structurels qui se répétera chaque année, le flux de camion se reporte sur le tunnel routier du Fréjus. En temps normal, celui-ci accueille environ 1 million de poids lourds par an, davantage que son homologue dont la fermeture de quinze semaines permet de mener un chantier expérimental de rénovation, pour rénover plus de 300 mètres de voûte.

Marc Fressoz

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