En 2023, la France comptait plus de 700 points d’avitaillement en gaz et en biogaz carburant, dont la moitié étaient publics, accessibles à tous. « La filière a dépassé l’objectif de 330 stations en 2028 fixé par la Programmation pluriannuelle de l’énergie 2020-2028 », souligne France Mobilité Biogaz (FMB). Ce réseau alimente un parc de 40 000 véhicules, en hausse d’environ 10 % en 2023, dont 25 000 véhicules lourds : 13 600 cars et bus (+ 12 % à fin février 2024 sur douze mois glissants), 11 400 camions (+ 18 %). Cette flotte « a presque triplé en cinq ans ; le gaz et le biogaz étant la première énergie alternative (au diesel, NDLR) pour les véhicules lourds en France », affirme l’association rassemblant les acteurs de la filière. L’an passé, 29 % de la consommation totale de gaz naturel pour véhicule (GNV) était d’origine « bio », soit issue de la dégradation de matières organiques animales et/ou végétales par des micro-organismes (méthanisation). « Nous devrions atteindre 100 % de biométhane en 2030 et offrir à tous les opérateurs de mobilité français un pouvoir de décarbonation comparable à celui de l’électrique », se félicite Erwan Cotard, président de FMB. À la condition cependant de comparer les énergies selon une « analyse de cycle de vie » (ACV) complète. Dans ce cas, le biogaz réduit de 80 % les émissions de CO2 comparées à celles du diesel et de plus de 90 % les polluants locaux (NOx et particules). La réduction de CO2 est de l’ordre de 25 % avec du gaz naturel.
Or, l’adoption du nouveau règlement CO2 pour les véhicules lourds, le 22 avril 2024, montre que les autorités européennes calculent les émissions atmosphériques des véhicules de façon différente. Seules sont comptabilisées les émissions du réservoir à la roue (ou à l’échappement). Cette approche favorise du coup l’électricité et l’hydrogène et exclut les autres carburants, notamment liquides, « bio » ou pas.
Le nouveau règlement CO2 prévoit une clause de revoyure en 2027. À date, deux propositions sont défendues par les partisans du biogaz pour préparer cette échéance. La première est le facteur de correction carbone. Il permet d’intégrer la part renouvelable des carburants alternatifs. La seconde vise à créer une homologation spécifique pour les véhicules roulants, exclusivement, au biogaz. Ce projet devrait être étudié par la Commission européenne en 2025. Dans l’intervalle, le biogaz entrera en France dans le champ de la taxe incitative à l’utilisation d’énergie renouvelable dans les transports (TIRUERT). Destinée aux distributeurs de carburants, elle vise à augmenter la part des énergies renouvelables dans leurs ventes. Pour générer des « crédits TIRUERT », le bioGNV devra émaner de Biogas Purchase Agreement (BPA) entre un producteur (souvent agriculteur-éleveur), une ou plusieurs entreprises consommatrices de bioGNV, comme des transporteurs routiers, et un énergéticien. Ces BPA produisent du bioGNV non soutenu par un tarif d’achat garanti par l’État. Ses membres en définissent le modèle économique et s’affranchissent ainsi de la volatilité des cours du gaz naturel. Présenté comme vertueux, ce système est censé soutenir les investissements dans la production de biogaz en France également.