Cinq ans après l’épidémie de la Covid-19, le trafic aérien français termine 2024 en retrait de 4 % sur 2019 avec 205,7 millions de passagers. Un résultat qui interpelle d’autant plus que le trafic aérien de l’Union européenne termine, lui, en hausse de 1,8 % par rapport à 2019 et que plusieurs pays jouxtant la France enregistrent des hausses notables : sans parler de la Grèce ou de la Turquie qui ont enregistré des hausses supérieures à 20 %, l’Italie termine l’année avec + 17 % et l’Espagne, + 13 %.
Le trafic le plus touché en France est le trafic domestique, en baisse de 5 % sur 2023 et surtout de 24,5 % comparé à 2019. En cause, la nouvelle réglementation interdisant tout vol domestique s’il existe une liaison ferroviaire réalisant le trajet en moins de 2 h 30.
Seuls 30 % des aéroports ont retrouvé leur niveau de 2019
D’où une inquiétude, notamment relayée par l’Union des aéroports français (UAF) : en 2024, seuls 30 % des aéroports français ont retrouvé ou dépassé le niveau de trafic 2019, dont seulement 26 % des aéroports métropolitains. Dans le détail, il apparaît clairement que dans certaines régions « des territoires sont en perte de vitesse », souligne Thomas Juin, président de l’UAF. Telles la Bretagne, la Normandie ou l’Aquitaine.
L’UAF et les professionnels de l’aérien s’inquiètent de plusieurs phénomènes. En premier lieu, des difficultés de trésorerie, notamment liées au fait que certaines dépenses régaliennes « très lourdes » (sûreté par exemple) ne sont pas complètement prises en charge par l’État avec donc un reste à charge pour les aéroports. S’ajoute à cela la récente hausse de la taxe de solidarité (peu ou prou, son triplement), appliquée uniquement en France. Or, celle-ci affecte directement les compagnies low cost dont la rentabilité du vol se joue parfois à quelques euros près par place. Dans un contexte de pénurie de livraisons d’avions, ces compagnies sont tentées de desservir des aéroports et des pays à la fiscalité avantageuse. Or, c’est oublier qu’en 2024, le trafic low cost a représenté 44,1 % du trafic aérien français, estime Thomas Juin pour qui cette hausse constitue bel et bien « le coup de grâce », notant que des directeurs d’aéroports s’attendent « à des déprogrammations des vols dans le futur alors que notre poids économique et touristique devrait mettre la France dans le peloton de tête des pays de l’Europe du Sud ».
L’aérien, variable d’ajustement du budget de l’État
« On va avoir un détricotage du transport aérien en France et on voudrait tuer ce secteur qu’on ne s’y prendrait pas autrement », dit-il en ajoutant, « l’aérien est devenu la variable d’ajustement du budget de l’État. Quel mépris ».
En tout cas, les chiffres tendent à montrer qu’on assiste à « un début de décrochage de la France par rapport aux pays concurrents, l’Espagne, le Portugal ou l’Italie. On n’avait jamais vu ça ». La France a-t-elle fait le choix, comme il l’affirme de la décroissance du transport aérien ? L’UAF et d’autres comme Air France, la FNAM ou plusieurs acteurs du transport aérien demandent surtout « qu’il y ait une vision pour le transport aérien en France et pour le maillage territorial dans le pays ».