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TRANSPORTS, INFRASTRUCTURES & MOBILITÉ

L’ÉDITO

CHRONIQUES

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LES INDUSTRIELS ATTENDENT DES OBJECTIFS RÉALISTES ET DES POLITIQUES STABLES ET COHÉRENTES POUR DÉCARBONER LEUR LOGISTIQUE

CHRONIQUES

LE COÛT DU TRAIN : UN OBSTACLE À LA DÉCARBONATION DES MOBILITÉS ? 

 

OPÉRATEURS FERROVIAIRES DE PROXIMITÉ ET SYSTÈME FERROVIAIRE

ÉDITO

LES INDUSTRIELS ATTENDENT DES OBJECTIFS RÉALISTES ET DES POLITIQUES STABLES ET COHÉRENTES POUR DÉCARBONER LEUR LOGISTIQUE

Lors de la journée fret ferroviaire & OFP du 26 novembre 2024, François Durovray, l’ancien ministre des Transports, a fait preuve d’un réalisme de bon aloi. S’exprimant devant un auditoire de spécialistes du secteur, il a reconnu publiquement que l’objectif d’une part modale de 18 % pour le fret ferroviaire en 2030 n’était plus réaliste, mais qu’il convenait de faire les meilleurs efforts pour tendre vers cet objectif.

La SNBC 3 et son volet stratégie de développement des mobilités propres (SDMP) sont soumis à la concertation nationale sur l’énergie et le climat. Il convient de bien garder à l’esprit que la SNBC 3 et la planification pluriannuelle de l’énergie (PPE) reposent sur un scénario commun.

Concernant la SDMP, les scénarios suivants sont proposés :

« Les projections de consommation énergétique pour le secteur des transports conduisent à une réduction de la consommation énergétique de 501 TWh en 2019 à 396 TWh à l’horizon 2030. En matière de GES, les émissions baissent de 134,1 MtCO2eq en 2019 et 131,2 MtCO2eq en 2022 à 90 MtCO2 en 2030 (au périmètre “Kyoto”, incluant les DROM) » (page 25).

S’agissant plus spécifiquement du transport de marchandises, essentiel à la réindustrialisation, à la souveraineté et même très directement à la transition écologique (notamment en raison de nouveaux besoins logistiques liés à l’économie circulaire, de l’évolution des process industriels et donc des intrants, ainsi que de la production des équipements et composants essentiels pour la transition énergétique), le scénario de la SDMP prévoit que « la part modale du fret ferroviaire double d’ici 2030 par rapport à 2019 [et augmente environ de 90 % par rapport à 2024, NDLR] pour atteindre 18 % de part modale conformément à l’objectif de la loi climat-résilience et en cohérence avec la stratégie nationale de développement du fret ferroviaire. La part modale du transport fluvial croît de 50 % pour atteindre 3 %.

Le transport de fret routier en tonnes.km diminue ainsi à l’horizon 2030, passant de 298 Md de tonnes.km (niveau de trafic 2019) à 273 Md de tonnes.km (- 8 %). L’optimisation du taux de chargement des camions conduit à une hausse du chargement moyen de 8,1 tonnes en 2019 à 8,4 tonnes d’ici 2030. Le trafic de poids lourds recule ainsi de 12 % entre 2019 et 2030 » (page 29).

L’Association des utilisateurs de transport de fret (AUTF) demande également du réalisme et d’écarter les narratifs non reliés à un plan d’action. Elle estime dans sa réponse à la consultation nationale énergie climat (cahier d’acteurs n° 305) que « la planification nationale doit et devra rester le plus réaliste possible, en fonction des différents objectifs et moyens alloués aux et par les acteurs économiques, en réconciliant notamment les travaux conduits par les filières et par les territoires avec les contrats d’objectifs et les financements des gestionnaires d’infrastructures ». Et illustre « l’objectif extrêmement ambitieux au départ, d’une part modale du fret ferroviaire portée à 18 % en 2030, semble déjà hors d’atteinte du fait de l’état actuel du réseau ainsi que des contraintes pesant sur les moyens financiers et humains de SNCF Réseau ».

En ce qui concerne l’objectif de développement du fret ferroviaire qui entraîne entre 85 % et 90 % de report modal en incluant les dessertes terminales en mode routier, et qui se traduit par une forte économie d’énergie, contrairement au développement du trafic de voyageurs (effets rebonds, changement de métrique des déplacements et induction de demande), l’AUTF formule également des propositions, parmi lesquelles :

Retenir pour cible réaliste le potentiel identifié à 2035 par les filières utilisatrices du transport conventionnel par trains complets et wagons isolés de 13 % par rapport à 2019 (conditions minimales de progrès permettant d’assurer les circulations commandées) à 56 % (dans un scénario ambitieux avec une amélioration substantielle de l’offre). 

Le saut entre les deux scénarios dépendant notamment : 1) des investissements au niveau des équipements de multimodalité, tels que les plateformes logistiques et les cours de marchandises, pour répondre aux besoins des filières liées aux matériaux de construction pour les chantiers, ainsi qu’aux filières de recyclage et industrielles utilisatrices de matières alternatives pour décarboner leur process (ferrailles, déchets d’aluminium, plastiques, etc.,) ; 2) de l’accès réseau et du maintien en conditions opérationnelles des capillaires fret et des LFDT ; 3) de la modernisation et du développement des installations de service.

Retenir également le doublement des circulations de transports combinés en 2035 par rapport à 2019 (de 50 rotations soit 100 circulations/jour, à 100 rotations soit 200 circulations/jour) ce qui conduirait, compte tenu de la part plus importante des lignes sur très long parcours, à multiplier par 2,7 les tonnes.km. Cela suppose de mettre en œuvre le schéma directeur de transport combiné et d’AF (maillage en terminaux adaptés et leur accès ferroviaire, gabarits pour permettre le transport de remorques, sillons compatibles avec le modèle économique des EF).

Élaborer, suivre et publier des KPIs de mesure de la performance afin d’inciter les gestionnaires d’infrastructures et les opérateurs à s’améliorer et les utilisateurs potentiels à se maintenir ou à (re)venir dans le mode ferroviaire.

Rééquilibrer les arbitrages marchandises/voyageurs en faveur du fret, tant pour les projets de renouvellement de l’infrastructure que pour l’attribution des sillons ou de la circulation en opérationnel, en tenant compte de l’efficience de décarbonation et d’économie d’énergie.

Il convient de noter que la conjonction du scénario bas pour le conventionnel et de la mise en œuvre du plan de transport probabiliste pour le multimodal aboutit à une part modale de 15 % (18 % dans le scénario ambitieux) en 2035 dans le cadre du scénario de demande micro (SNBC 3) et de 12,5 % dans celui d’un scénario d’évolution de la demande en fonction des hypothèses de production industrielle (15 % dans le scénario ambitieux).

LE COÛT DU TRAIN : UN OBSTACLE À LA DÉCARBONATION DES MOBILITÉS ? 

Sur les réseaux sociaux comme au Café du Commerce, le constat est unanime : les billets de train sont trop chers. Mais les clients de la SNCF ne sont pas les seuls à se plaindre. Les régions, qui subventionnent les TER, trouvent aussi l’addition salée. Pourquoi le train est-il si coûteux ? N’est-ce pas un obstacle au report modal et à la décarbonation des mobilités ?

Le transport ferroviaire de voyageurs est un ensemble hétérogène. La diversité des services n’a d’égale que celle des prix. L’arrivée du TGV il y a quarante-trois ans a mis fin à l’ancienne règle d’un prix établi en fonction de la distance parcourue, tout comme l’on fait les abonnements de travail, mais aussi les divers forfaits proposés par les régions, en charge des TER depuis près de vingt-cinq ans. Pour nous y retrouver dans ce qui ressemble à un maquis, nous partirons du prix des billets pour le voyageur avant d’élargir la réflexion au coût du train pour la collectivité. En quoi les prix et les coûts sont-ils un obstacle au développement du rail ?

Loin des idées reçues, le TGV est relativement accessible

Commençons par quelques chiffres. Un voyageur souhaitait se rendre de Paris à Marseille le vendredi 20 décembre 2024. Fin octobre, il a cherché le prix du TGV inOui 131 € l’aller simple : exorbitant ? Pas si évident, le même trajet en TGV OUIGO coûtait 99 € et 69 € en partant de Massy-Palaiseau. Pour une durée porte à porte un peu supérieure, l’avion était à plus de 130 € avec le coût du trajet vers l’aéroport. Pour la voiture, le seul total carburant plus péage (sans les coûts fixes) dépassait les 110 €, mais pour 8 h de trajet. C’était plus de 10 h par autocar pour environ 65 €.

Si on prend en compte le confort et la durée du voyage, le prix du TGV était donc très compétitif, car, à la veille des vacances de Noël, tous les opérateurs poussaient les prix à la hausse, la demande étant structurellement supérieure à l’offre. En effet, pour ce type de déplacement, l’offre n’est pas dimensionnée pour répondre aux pointes de trafic. Il est donc nécessaire d’étaler la pointe et d’inciter ceux qui le peuvent à décaler leur voyage. Dans cette perspective, accroître les prix est un moyen efficace et une source de revenus pour l’opérateur. Les clients détestent cette pratique, car ils savent que les prix peuvent être beaucoup plus bas. Néanmoins, c’est justement parce qu’ils sont élevés à la pointe qu’ils peuvent être bas en période creuse.

Ainsi, réserver fin octobre 2024 un Paris-Marseille pour le vendredi 22 novembre coûtait seulement 50 € en TGV inOui, 29 € en OUIGO, en partant de Marne-la-Vallée. L’avion était à plus de 100 €, la voiture aussi, et l’autocar à 29 €. Les prix du TGV ne sont donc pas exorbitants. L’Autorité de régulation des transports (ART) nous apprend dans ses rapports que le prix d’un billet inOui est en moyenne 10 centimes par kilomètre parcouru contre 5 pour OUIGO et 4 pour l’autocar alors qu’une automobile revient à environ 25 centimes par kilomètre à son propriétaire, dont 10 centimes pour le carburant. D’où vient alors cette idée que les prix des TGV sont trop élevés ?

  • Elle émane d’abord des familles. Elles savent que pour 3 ou 4 personnes, la voiture est plus économique, surtout en évitant les péages autoroutiers (10 ct/km)¹.
  • Elle résulte ensuite de la comparaison avec les prix du low cost aérien (3 à 5 ct/km). Mais dans ce cas, est-ce le train qui est trop cher ou l’avion qui ne l’est pas assez (kérosène détaxé) ?
  • Elle est enfin le produit d’un opportunisme consumériste. Consumérisme, car, réputés « chers », les TGV sont pourtant remplis de jeunes et de retraités voyageant pour les loisirs et d’actifs dont le trajet est pris en charge par l’entreprise. Opportunisme, car, le train étant réputé bon pour l’environnement, même si la ficelle est un peu grosse², pourquoi ne pas le subventionner largement comme le sont les TER ?

Les deux visages du TER

 Le problème est que les TER aussi coûtent cher aux voyageurs occasionnels. Il en va de même pour les Intercités. Pour un aller de Paris à Orléans, il fallait compter, en 2024, 22,4 € pour 110 km, soit 20 centimes par kilomètre, deux fois plus qu’un TGV inOui, 4 fois plus qu’un OUIGO ! Pour payer beaucoup moins cher, 3 à 5 centimes par kilomètre, il faut être étudiant ou abonné pour le trajet domicile-travail. Or, les paiements des abonnés représentaient 28 % des recettes commerciales des TER en 2015, mais seulement 20 % en 2022. L’ART nous apprend ainsi que les clients occasionnels sont de plus en plus nombreux dans les TER, souvent pour des trajets de moyenne et de grande distance. Il en résulte pour la SNCF une progression sensible de ses recettes commerciales, sans que cela se traduise par une baisse des subventions publiques.

Le TER coûte également cher aux régions et à l’État. En 2022, les subventions totales se sont élevées à 6,4 Md€ (4,4 des régions pour l’exploitation, 2 de l’État pour les péages), soit 33 centimes chaque fois qu’un passager fait un kilomètre sachant que ce même passager a payé en moyenne 10 centimes par kilomètre. Exorbitant ? On peut le penser. Le coût public des trains régionaux est en France trois fois plus élevé que dans les autres pays de l’Union européenne et notamment l’Allemagne. D’où provient cette situation ?

  • La première explication est structurelle. Dans tous les pays d’Europe, les trains régionaux sont subventionnés, car leur taux de remplissage est faible, autour de 30 %. Ils peuvent être bondés le matin (dans un sens), mais presque vides en heures creuses. Le problème est le même que pour les transports collectifs urbains. Le parc roulant et les infrastructures sont dimensionnés pour l’heure de pointe, d’où des coûts fixes élevés. En outre, l’attractivité de l’offre suppose une fréquence qui accroît les coûts d’exploitation.
  • La seconde explication renvoie à deux caractéristiques propres à la France. Les coûts élevés de la SNCF d’une part et d’autre part le nombre de circulations TER en zone peu dense où, même en heure de pointe, les taux de remplissage sont faibles.

Il ne faut donc pas espérer une baisse sensible des prix des billets des TER. Cependant, pour les régions, il est possible de réduire les coûts ou d’améliorer l’offre pour le même prix. C’est l’objectif de l’ouverture à la concurrence par appel d’offres. L’expérience allemande nous apprend que la concurrence « pour le marché » n’empêche pas l’opérateur historique de conserver 80 % du marché national. L’entrée de nouveaux acteurs vise principalement à mettre sous pression l’opérateur historique. Certaines régions ont déjà testé le principe et elles obtiennent une sensible amélioration du rapport qualité-prix, y compris de la part de la SNCF, qui s’adapte.

 

Elle vient de lancer son projet « Destination voyageurs 2030 ». À terme, des sociétés dédiées, autonomes et responsables, seront chargées de gérer chaque lot gagné en région lors des appels d’offres. Les syndicats sont hostiles à ce qu’ils appellent « filialisation », mais n’est-ce pas le meilleur moyen de remettre en cause le consensus de sous-productivité qui domine encore dans plusieurs entités de l’opérateur historique ? Une meilleure productivité du ferroviaire est nécessaire, mais elle ne sera pas suffisante pour changer sensiblement les parts modales.

Le deuil du report modal vers le ferroviaire : quelles implications ? 

La formule selon laquelle le transport ferroviaire devrait être la colonne vertébrale des transports de personnes et de marchandises est encore fréquemment utilisée notamment dans la perspective de leur décarbonation. Cette idée est pourtant obsolète pour deux raisons principales.

La première est que le ferroviaire n’est que marginalement un substitut des modes routiers et aériens. Ces derniers répondent à des demandes que, le plus souvent, le rail ne peut satisfaire ni en prix ni en volume.

La seconde est le coût élevé du ferroviaire pour les budgets publics.

Ces deux constats ont conduit l’Union européenne à réduire ses ambitions sur le report modal. Dans le pacte vert, chaque mode est appelé à travailler à sa décarbonation. Si le rail reste une priorité pour les aides de l’Union européenne aux réseaux transeuropéens, il n’est plus censé se substituer largement aux autres modes. Quelles sont les implications de cette nouvelle donne, pour les passagers comme pour les autorités organisatrices ?

Les passagers du ferroviaire, et notamment des TGV, doivent prendre conscience du fait que se déplacer, surtout à 300 km/h, a un coût et qu’ils doivent le supporter. L’argument selon lequel ce prix est dissuasif pour les plus modestes ne doit pas être un prétexte pour subventionner la mobilité des CSP+³. Ce message concerne aussi ceux qui demandent une baisse des péages sur les LGV, notamment pour que la concurrence puisse s’y exercer, comme en Italie ou en Espagne. N’oublions pas que dans ces deux pays les péages sont faibles parce que les administrations publiques subventionnent fortement l’infrastructure, sa construction et son exploitation⁴. Est-il logique de subventionner « coûte que coûte » la mobilité des plus aisés ?

Les autorités organisatrices doivent revenir à la raison. Le « mur du financement » évoqué par le rapport 2023 du Conseil d’Orientation des Investissements (COI) n’est pas destiné à être franchi par la magie d’une « Conférence de financement ». Les surenchères ferroviaires, notamment celles de certains SERM, vont simplement nous conduire « dans le mur » comme l’a rappelé Jean-Pierre Orfeuil. Compte tenu de l’état des finances publiques, le plus urgent est d’amorcer une désescalade ferroviaire.

La transformation des mobilités dans les prochaines années ne se manifestera pas sous la forme d’un report modal massif vers le ferroviaire, mais par une nouvelle organisation des mobilités routières fondée sur un partage de la voirie bénéficiant aux modes actifs, aux autocars et aussi au covoiturage, sachant que la voiture particulière restera dominante. Pour cette raison, l’électrification du parc roulant étant lente, la décarbonation des transports prendra plus de temps qu’espéré⁵. Un deuil peut en cacher un autre !

 

Notes

  1. Sur les sections autoroutières à péage, le trafic augmente pourtant plus vite que sur le reste du réseau…
    2.Près d’un tiers des TER en circulation, sur les plus petites lignes, utilisent du carburant diesel. Comme le taux de remplissage y est faible, leur bilan carbone n’est pas meilleur que celui d’une automobile.
    3. https://www.autorite-transports.fr/wp-content/uploads/2020/07/enquete-tagv-2019.pdf Dans cette note, l’ART nous apprend que 77 % des voyageurs inOui de première classe sont des CSP+ ou des retraités, un chiffre qui tombe à 61 % en seconde classe.
    4. En Italie, pour éviter la faillite de l’opérateur privé NTV, il a fallu baisser fortement les péages, au prix de dépenses accrues pour l’État et les régions.
    5. https://www.citepa.org/fr/barometre/ Dans son baromètre de décembre 2024 le CITEPA signale que durant les 9 premiers mois de l’année, les émissions de CO2 du transport routier n’ont baissé que de 1 %, celles du transport aérien international ont crû de 7 %.


 

OPÉRATEURS FERROVIAIRES DE PROXIMITÉ ET SYSTÈME FERROVIAIRE

En une quinzaine d’années, la journée annuelle initialement organisée autour du thème des OFP (opérateurs ferroviaires de proximité) est devenue un moment de rencontre de l’ensemble des acteurs du système de fret ferroviaire français. Une vision systémique est en effet une condition nécessaire, sinon suffisante, pour remédier à une faiblesse dont le diagnostic est largement partagé, même si les voies de sortie sont en débat…

Les rencontres Objectif OFP, à l’initiative de Jacques Chauvineau et d’André Thinières, répondaient d’abord à une situation radicalement nouvelle : l’ouverture du marché du fret ferroviaire européen à la concurrence (ouverture en droit en 2003 pour le fret international et en 2006 pour le fret intérieur, ouverture effective en France à partir de 2004), rompant avec la situation de monopole qui était celle de la SNCF depuis sa création en 1938.

Ouverture à la concurrence et naissance des OFP

Dans ce contexte, on pouvait s’attendre à ce que de grands opérateurs de fret européens (appartenant le plus souvent aux groupes nationaux historiques) tentent de pénétrer le marché français, mais l’accent était mis sur un phénomène plus original : l’émergence d’opérateurs nouveaux, de taille modeste, concentrant leur activité sur des marchés locaux pour construire, avec les chargeurs, des solutions ferroviaires mieux adaptées à leurs besoins. Le modèle était inspiré des « short lines » américaines qui alimentent les grands réseaux en trouvant des clients sur leur territoire et en ramassant et livrant des wagons sur des lignes secondaires.

De fait, la part de ces nouveaux entrants est restée modeste, comme le montre le partage du volume de fret en 2022 (en tonnes.kilomètres). Fret SNCF reste largement majoritaire (en tant que telle et à travers ses filiales Captrain et Naviland Cargo), en attendant les effets de la « discontinuité » mettant fin à Fret SNCF et donnant naissance à Hexafret et Technis à partir de 2025.

Part des tonnes.km réalisées par les entreprises ferroviaires sur le marché français. Source : Le Marché français du transport ferroviaire en 2022, Autorité de régulation des transports (ART), 2023.

Pour une vision d’ensemble du fret ferroviaire

Si les OFP et d’autres entrants de petite taille n’ont pas bouleversé la situation, de manière plus générale, l’ouverture à la concurrence n’a pas déclenché la reprise du trafic que certains annonçaient.

C’est la nécessité de développer le fret ferroviaire en France (parmi les plus faibles en Europe en matière de part du transport de marchandises) qui a changé récemment de vieilles habitudes. La préparation de la Stratégie nationale pour le développement du fret ferroviaire¹ a mobilisé, à côté de l’administration, l’ensemble des acteurs, réunis pour la première fois dans l’Alliance 4F (Fret ferroviaire français du futur)².

Ainsi, la journée « Objectif OFP » du 26 novembre 2024 s’inscrivait-elle sous deux sigles : Fret ferroviaire du futur et OFP³. Elle réunissait les dirigeants et représentants de toutes les composantes, nombreuses et disparates, mais essentielles, d’un système en manque de modernisation et de développement : administration centrale, collectivités territoriales, gestionnaires d’infrastructures, entreprises ferroviaires grandes et petites, chargeurs et organisateurs de fret, industrie ferroviaire, gestionnaires de plateformes logistiques, entreprises de travaux publics, etc., sans omettre le ministre d’alors pour la clôture.

Initialement focalisée sur un élément novateur, mais d’un poids limité, la journée OFP est devenue au fil des ans un rendez-vous de tout le système ferroviaire. La récente session évoquait à la fois le réalisme et l’espoir puisqu’elle s’intitulait : « Des perspectives pour l’avenir malgré les difficultés actuelles. » Souhaitons que les moyens nécessaires soient mobilisés pour pouvoir espérer aussi.

 

Notes

  1. Ministère chargé des Transports, 2021.
  2. Voir « Le Réveil du fret ferroviaire en France ? » dans le n° 529 de Transports, Infrastructures et Mobilité de septembre-octobre 2021.
  3. Voir le programme : 14e Rencontre annuelle du fret ferroviaire du futur et OFP., https://journee-ofp.org/index.html

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  • La gratuité du transport public : le versement mobilité injustement gaspillé
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    Ingénieur-conseil

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