Marseille-Nice : Transdev confronté aux difficultés du nouvel entrant

©© Alstom/Yellow Window

Pas facile d’essuyer les plâtres de l’ouverture à la concurrence sur le marché des trains régionaux. Transdev dispute une épreuve contre-la-montre semée d’embûches afin d’être prêt à faire circuler ses trains entre Nice et Marseille mi-2025 pour assurer « 15 allers et retours par jour, soit un doublement de l’offre », rappelle Thierry Mallet, le PDG de Transdev. La filiale de la Caisse des dépôts sera le premier concurrent de la SNCF à faire son entrée sur ce marché conventionné.

Le contrat de délégation de service public, remporté par Transdev en novembre 2021 comprend l’intégration de nouvelles rames – des Omneo de l’ex-Bombardier devenu Alstom – avec la formation des conducteurs, mais aussi la construction et l’exploitation d’un atelier de maintenance pour ce matériel. L’ensemble est financé par l’autorité organisatrice. Le volet le plus délicat est certainement le moins visible. L’entreprise ferroviaire doit recruter 163 personnes, dont les conducteurs et les mainteneurs qui sont les métiers les plus critiques pour réussir le démarrage en 2025.

Transdev expérimente les règles très encadrées de transfert de personnel entre l’entreprise sortante et le nouvel opérateur. Il se joue en deux temps. La SNCF a d’abord désigné les cheminots affectés à plus de 50 % de leur temps aux lignes concernées comme étant transférables. Sur cette base, les volontaires pour aller travailler chez Transdev se font connaître. Dans le cas d’un sous-effectif de volontaires, la SNCF désigne d’office les agents à transférer. En cas de refus, elle doit leur proposer des reclassements dans la région concernée, le cheminot étant licencié après un certain nombre de refus. Or, fin 2023, seule une trentaine de cheminots avaient accepté le transfert. Principaux syndicats sur la ligne Marseille-Nice, SUD-Rail et la CGT ont donné pour mot d’ordre de boycotter le transfert vers un opérateur privé. Objectif : rendre le nouvel entrant incapable d’assurer 100 % du service et montrer à tous les élus régionaux que faire appel au privé est voué à l’échec. À l’inverse, sur l’étoile d’Amiens par exemple, la SNCF ne rencontre pas ce problème. « Même s’ils vont dans une filiale avec des conditions différentes, les cheminots ont l’impression que c’est la SNCF, tandis qu’aller chez Transdev, c’est le saut dans l’inconnu », résume un responsable de la CGT. « Nous avions défini plusieurs scénarios et un faible nombre de transferts de conducteurs en fait partie », minimise Edouard Hénaut, le directeur général de Transdev France. Face à cette difficulté, l’opérateur compte sur ses ressources internes et parie sur la mobilité interne au sein du groupe. Problème, avec CFTA et le tram-train de Lyon, l’opérateur compte peu de cheminots dans ses rangs. « Nous allons former des conducteurs de bus et de tram volontaires ainsi que recruter à l’extérieur les cheminots SNCF et les conducteurs de fret qui se présentent à nous », poursuit-il. Reste que le taux de réussite d’une école de conduite, dans laquelle la formation dure environ un an est loin de 100 %. Certains abandonnent en cours de route, d’autres échouent. Reste à savoir dans quelle mesure Transdev arrivera à se différencier par rapport à la SNCF. Dans ces intentions, la compagnie dit par exemple vouloir tenir davantage compte des desiderata des roulants que la SNCF dans la fabrication des roulements. Néanmoins, cela ne fait pas tout. Certitude, elle a intérêt à offrir des rémunérations au moins aussi attractives que sa concurrente.

La libéralisation du TER réussit à la SNCF. Elle a jusqu’ici remporté 4 appels d’offres sur 5 attribués, soit les lots Sud Azur sur l’étoile de Nice, étoile d’Amiens en Hauts-de-France, TER tram-train & Sud Loire en Pays de la Loire, et T4-T11 en Île-de-France. Fin 2024, le nouveau régime d’exploitation du TER commencera à entrer en vigueur. La SNCF exploitera avec ses filiales dédiées l’étoile de Nice, l’étoile d’Amiens, Loire Océan sur le Tram-train nantais et T4-T11. « Fin 2023, nous sommes sortis du monde des conventions sans concurrence, en fin d’année 2024, nous entrerons dans l’exploitation après mise en concurrence. Une année déterminante pour être prêts à relever ce défi. Nous serons prêts. »

Marc Fressoz

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